Conférence de Bandung

Les luttes coloniales et les processus de décolonisation (l'un pacifique et l'autre militaire) conduisent à des transferts de populations. L'éclatement de l'Empire des Indes britanniques entraîne la naissance de quatre états en 1947 et 1948 : la Birmanie, Ceylan (Sri Lanka), l'Union indienne et le Pakistan. Environ 17 millions de personnes se déplacent pour s'installer dans le pays où leur religion est majoritairement représentée.

Devant l'effacement des pays colonisateurs et face aux deux superpuissances qui s'opposent dans la guerre froide (les Etats-Unis et l'URSS) , les nouveaux pays indépendants cherchent à se fédérer et s'affirmer sur la scène internationale. Ils vont constituer un troisième bloc, celui "des non-alignés". Ils sont aussi confrontés à de nouveaux défis. La conférence de Bandung en 1955 est l'acte de naissance politique du Tiers-Monde.

Les grands acteurs de cette rencontre sont l'Indien Nehru, l'Égyptien Gamal Abdel Nasser, et le Chinois Zhou Enlai.

Discours de clôture de Nehru à la conférence de Bandung (24 avril 1955)

Depuis sept jours nous sommes dans cette belle ville de Bandung, et Bandung a été au cours de cette semaine le point de mire, la capitale, devrais-je dire, de l'Asie et de l'Afrique [...]. Vous avez vu le projet de communiqué final que je vous ai lu. Je pense qu'il représente un résultat considérable. Mais j'aimerais plus encore attirer votre attention sur le fait que nous nous sommes rencontrés, vus, liés d'amitié et que nous avons discuté ensemble pour trouver une solution à nos problèmes communs [...].

Il y a aujourd'hui un autre esprit en Asie [...]. L'Asie n'est plus passive [...]. Il n'y a plus d'Asie soumise, elle est vivante, dynamique [...]. Nous sommes résolus à n'être d'aucune façon dominés par aucun pays, par aucun continent. Nous ne sommes pas des « béni-oui-oui » qui disent « oui » à n'importe quel pays. Nous sommes des grands pays du monde et voulons vivre libres sans recevoir d'ordres de personne. Nous attachons de l'importance à l'amitié des grandes puissances, mais [...], à l'avenir, nous ne coopérerons avec elles que sur un pied d'égalité. C'est pourquoi nous élevons notre voix contre l'hégémonie et le colonialisme dont beaucoup d'entre nous ont souffert pendant longtemps. Et c'est pourquoi nous devons veiller à ce qu'aucune autre forme de domination ne nous menace. Nous voulons être amis avec l'Ouest, avec l'Est, avec tout le monde. Le seul chemin qui mène droit au cœur et à l'âme de l'Asie est celui de la tolérance, de l'amitié et de la coopération. [...]

Je pense qu'il n'y a rien de plus terrible que l'immense tragédie qu'a vécue l'Afrique depuis quelques siècles [...], depuis l'époque où des millions d'Africains ont été expédiés comme esclaves en Amérique ou ailleurs, la moitié d'entre eux mourant dans les galères. Nous devons tous accepter la responsabilité de ce drame, oui tous, même si nous ne sommes pas directement compromis. [...] Malheureusement, même aujourd'hui, le drame de l'Afrique est plus grand que celui d'aucun autre continent, tant au point de vue racial que politique. Il appartient à l'Asie d'aider l'Afrique au mieux de ses possibilités, car nous sommes des continents frères.

Jawaharlal Nehru, Discours, New Delhi, 1949-1961.

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